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Huit journalistes de la Maison des journalistes sont dans le centre de Rennes cette semaine. Accueillis dans les rédactions de Ouest-France et au club de la presse, ces professionnels continuent de défendre la liberté d’informer.

Noorwali Khpalwak (journaliste afghan), Asghar Noormohammadi (journaliste afghan), Sayed Zakeria Hashemi (journaliste afghan), Elyaas Ehsas (journaliste afghan), Sakher Edris (journaliste syrien), Manar Rachwani (journaliste syrien), Niyaz Abdullah (journaliste kurde-irakienne) et Grégoire Blaise Essono (journaliste camerounais) ont un point commun : avoir fui leur pays où leur vie était menacée. Ces 8 journalistes accueillis ou accompagnés par la MDJ, sont du 16 au 24 mai les hôtes du groupe Sipa Ouest-France en partenariat avec l’association Europe Presse Solidarité.

Toute la semaine, les huit exilés vont à la rencontre des journalistes bretons. À Ouest-France, ils assistent aux réunions de rédaction où ça parle élections législatives, burkini, propos dictatoriaux de l’un ou l’autre homme politique. Ils vont pouvoir découvrir de près le travail acharné des journalistes dans presque tous les services d’information du journal, ainsi que celui de leurs confrères des rédactions de Presse Océan à Nantes, Courrier de l’Ouest à Angers, et Maine libre au Mans.

Ce stage immersif chez Ouest-France, permet de faire découvrir le monde du travail journalistique ici en France à ces professionnels de média exilés, et surtout, il participe dans leur reconstruction.

Déjeuner et échange au club de la Presse

À cette occasion, Mercredi 18 mai à 12h30, le Club de la Presse de Bretagne a convié tous ses adhérents à participer à une rencontre exceptionnelle avec les journalistes sur le temps d’un déjeuner dans les locaux du Club

Faire notre métier là-bas est devenu impossible et le peu de journalistes qui restent vivent des choses très dures, souffle Asghar Noormohammadi. Le jeune Afghan, photographe et vidéaste est hébergé depuis quelques mois à la Maison des journalistes, à Paris. Ses sept autres camarades sont aussi soit logés ou accompagnés par la MDJ. Niyaz Abdullah, kurde irakienne, ne cache pas son plaisir de pouvoir parler. Raconter les menaces de mort que j’ai vécues, décrire le procès interminable pour un article que je n’avais pas écrit, c’est essentiel. J’ai besoin de partager, de sentir les gens me soutenir, reconnaît franchement la jeune femme.

Courber l’échine, n’entendre qu’une seule voix et le même parti depuis 60 ans, trop peu pour moi aussi , témoigne Grégoire Blaise Essono. Le Camerounais a dénoncé des détournements d’argent, il a dû s’exiler.  Et là, je suis rentrée dans une aventure terrifiante . Sa route est passée par la Libye, il a tenté la traversée par la Méditerranée, a passé plusieurs mois en prison. Les migrants, c’est un système qui paie là-bas, on peut être revendu plusieurs fois, ça n’a pas été facile ​, résume le francophone dans un rire qui se déclenche, comme pour chasser l’horreur.

France et démocratie

J’ai dormi dans les rues de Paris, dans le métro, mais c’est la France qui m’a accordé mon statut de réfugié, rappelle Elyaas Ehsas, journaliste afghan menacé par les talibans dans son pays, il est d’abord passé par la Suède, il était soumis au règlement européen de Dublin, qui l’oblige à poursuivre ses démarches dans ce premier pays d’Europe où il avait laissé ses empreintes. Elyaas Ehsas a pu enfin obtenir le statut de réfugié en février. Quand j’étais en Suède, j’étais un clandestin qui payait ses factures et on m’a toujours tourné le dos .

Les plaintes des Français sur leur démocratie, il y a deux façons de les voir, analyse avec humour Manar Rachwani, journaliste syrien qui a dû quitter la Syrie, après le massacre de sa ville Hama en 1982. Exilé en Jordanie, il se trouve accusé par les services secrets jordaniens d’espionnage. Il a dû alors fuir.  C’est super de pouvoir critiquer le système et vous voulez l’améliorer, j’applaudis. Ou alors, vous pensez vraiment que vous avez des tyrans ici, et si c’est vrai, je me dis que je n’ai pas fait autant de chemin pour ça ! Tous rient. 

Améliorer le monde, c’est un combat constant. Ici, ce qu’il faut, c’est une meilleure intégration, investissez sur nous, lance Sakher Edris, également syrien. Il a créé un site internet pour faire changer le regard sur les migrants. Ses articles mettant en lumière des histoires positives. Tous, d’une manière ou d’une autre, continuent d’informer leurs compatriotes. C’est leur métier.

 © Ouest-France / © Asghar Noor Mohammadi / © Club de la Presse


Revue de presse

Le Mans. « La guerre nous fait oublier que le reste existe », selon ces journalistes réfugié
Rennes. Journalistes et réfugiés : « Faire notre métier était devenu impossible »
Angers. Des journalistes réfugiés accueillis au Courrier de l’Ouest

Pendant 5 jours, des collégiens et des lycéens ont été réunis autour du thème « S’informer pour comprendre le monde », l’occasion pour eux de revenir aux fondamentaux des médias par l’intermédiaire de discussions déconstruisant les idées reçues et de s’approprier les droits et devoirs de celui qui est à l’origine de l’information : le journaliste. Entre interviews et rencontres avec les scolaires, pour la quinzième année consécutive la Maison des journalistes était en première ligne pour sensibiliser à la nécessité de « l’information responsable » et inciter les jeunes à développer leur esprit critique.

Sakher Edris, journaliste syrien, au lycée Jacques Brel à la Courneuve

Série de rencontres Renvoyé spécial

La Maison des journalistes, acteur majeur de la semaine de la presse et des médias organisée par son partenaire le CLEMI, a mobilisé quatre de ses journalistes pour aller à la rencontre des élèves. De Lille à Deauville, en passant par La Courneuve ou Provins, les journalistes exilés ont sillonné la France pour témoigner en tant que professionnels des médias.

Mardi 22 mars : Escale au Nord et en Normandie

Deux rencontres ont eu lieu le mardi 22 mars 2022. À Lille, Manar Rachwani, a rencontré des élèves du Lycée technique, professionnel et général César Baggio. Journaliste syrien ayant travaillé une grande partie de sa vie en Jordanie, Manar est revenu avec les lycéens sur l’état de la liberté de la presse dans les pays du monde Arabe. Lors de la rencontre il a échangé avec les élèves sur les techniques qui, selon lui, mettent à mal la liberté des médias : l’autocensure, la juste privée c’est à dire le musellement des journalistes du fait de procès engagé par des groupes privés et l’information prédéfinie par les gouvernements. Pour le journaliste, ces trois situations sont un fléau pour la Jordanie, mais aussi pour certains pays européens.

Le même jour, Mariam Mana journaliste afghane s’est rendue au lycée André-Maurois de Deauville dans le Calvados. Accueillie chaleureusement par les élèves de première spécialisés en géopolitique, la journaliste a eu l’occasion de rappeler l’importance du fact-checking  face à des situations comme celle de l’Ukraine ou l’Afghanistan et de s’exprimer sur la place de la femme dans ce pays tenu par les Talibans.

Jeudi 24 mars : initiation au journalisme citoyen pour élèves de Provins

Pour le troisième rendez-vous, Samad Ait Aicha journaliste d’investigation marocain s’est rendu à Provins pour sensibiliser les élèves du collège Jules Verne sur les thématiques de la liberté d’expression et de la liberté de la presse. Lors de cette rencontre, Samad, qui est considéré comme l’une des figures centrales du journalisme citoyen marocain, est revenu sur la démocratisation des voies d’information et de la nécessité de chacun de se saisir de son smartphone pour participer à la production d’une information libre et éclairée.

Vendredi 25 mars : la Syrie invitée à la Courneuve

La Semaine de la presse et des médias s’est achevée pour la Maison des journalistes par la rencontre entre le journaliste syrien Sakher Edris la seconde du lycée Jacques Brel de la Courneuve. Pour l’occasion, l’ancien résident de la MDJ a raconté son histoire au travers du tragique destin de la Syrie : la prise du pouvoir par la famille Assad, l’emprisonnement de son père et son oncle, la tentative de révolution du peuple au moment du Printemps arabe… Au regard de l’actualité ukrainienne, Sakher qui a l’habitude d’aller à la rencontre des scolaires, a adapté sa présentation afin de faire un parallèle entre la guerre en Ukraine et celle en Syrie. Par l’intermédiaire de photographies de guerre, le journaliste a montré aux élèves les similarités entre les deux champs de batailles. Selon le média local Regard, présent lors des échanges, cette rencontre a suscité beaucoup d’admiration de la part des étudiants qui ont posé d’innombrables questions.

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Mariam Mana, journaliste afghane au lycée André-Maurois à Deauville
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Le journaliste syrien Sakher Edris et l’équipe de la MDJ au lycée Jacques Brel à la Courneuve
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Samad Ait-Aicha, journaliste marocain au collège Jules Verne à Provins
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Darline Cothière au micro de NRJ 12

À l’occasion de la semaine de la presse, Darline Cothière, directrice de la MDJ a été interrogée par NRJ12 sur la liberté de l’information et tous ses aspects, elle en a profité pour rappeler que « La liberté de la presse est fondamentale parce qu’elle permet de garder un équilibre démocratique et qu’on a besoin d’être informé pour comprendre le monde qui nous entoure, car lorsque la liberté de la presse est bafouée, c’est une atteinte à la démocratie, c’est une atteinte au citoyen. C’est malheureusement ce qui arrive dans les régimes totalitaires et liberticides ».

« Ils sont une quarantaine en exil et souvent menacés de morts, à s’installer chaque année dans les murs de la MDJ. Reste que l’association gérant ce lieu ne cache pas une situation financière fragile. […] »

Au début 2016, les journalistes du SNJ (Syndicat National des Journalistes) sont venus visiter la MDJ et rencontrer des journalistes réfugiés, comme Elyse NGABIRE et Koshraw MANI. Une visite rapportée dans le numéro 320 de leur journal à découvrir en cliquant ici.

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