Yarmouk / Paris ~ Crédit Photo : Valérie RohartIls ont eu le courage de résister dans leur pays.
Ils ont été contraints de fuir.
Vous aussi apportez votre soutien aux journalistes en exil.
Aidez la Maison des journalistes qui les accueille

They were brave to resist in their country.
They had to flee.
You too you can support the journalists in exil.
Help the House of Journalists which hosts them.

Yarmouk / Paris 

Réalisation : Valérie Rohart
Photos : Ammar Abd Rabbo et Valérie Rohart
Montage : Adrien Pagotto
Dessins : Adjim Danngar (Achou)
Musique :
Trio Joubran / Sama Sounounou
Basel Zaraa Emily Chirchill / When you’re born a refugee
Crédits Agence Sepium 2014

Article de Adad Kana’an (pseudonyme).

Traduit de l’arabe au français par Aline Goujon

 

Cliquez ici pour lire l’article en langue arabe publié dans damascusbureau.org, le 25 avril 2014

 

En France, les journalistes syriens marqués par l’exil et la détention peuvent prendre un nouveau départ, grâce à l’association « La Maison des journalistes » qui les aide à s’adapter.

mahmoud

Le journaliste Mahmoud el-Hajj est arrivé en France, depuis le Liban, avec l’aide de Reporters sans frontières.

(Paris, France) – Bien que Mahmoud el-Hajj, journaliste syrien de 21 ans, ait achevé son séjour à la Maison des journalistes depuis plus d’un mois, il continue d’y aller de temps à autre pour rendre visite à ses collègues syriens ou consulter son courrier.

Ce jeune Syrien arrivé à Paris depuis près de huit mois a connu la même situation que des dizaines de journalistes étrangers, dont de nombreux Syriens, qui ont résidé, chacun séparément et de façon temporaire, dans des chambres de cet ancien bâtiment situé dans le sud de la capitale française, dans le quinzième arrondissement. Ces journalistes bénéficient de l’assistance de la Maison des journalistes, une organisation non gouvernementale qui œuvre en faveur des journalistes réfugiés et les aide à prendre un nouveau départ.

Le hasard a fait que j’ai rencontré Mahmoud à nouveau et séjourné en même temps que lui à la Maison des journalistes, alors que nous nous étions connus durant l’hiver 2012, à Beyrouth. C’est sous la contrainte qu’il a quitté le territoire libanais, tout comme le syrien. Au Liban, il était persécuté par des membres du Hezbollah et avait des problèmes avec les autorités du fait qu’il ne possédait pas de papiers d’identité. Tout cela l’a poussé à faire appel à l’organisation Reporters sans frontières pour se faire aider à quitter le pays, et c’est ainsi qu’il a pu obtenir un visa pour entrer en France. Quant aux conditions dans lesquelles il a quitté la Syrie, Mahmoud se garde de les évoquer.

Au sujet de son séjour à la Maison des journalistes, Mahmoud explique : « C’est vraiment bien d’avoir une chambre de quatre mètres sur quatre pendant six mois, dans un endroit comme Paris. Cela permet aux étrangers comme nous, même temporairement, de s’adapter au rythme d’une ville mouvementée comme Paris. »

Mon expérience personnelle de réfugié est assez similaire à celle de Mahmoud. J’ai quitté la Syrie en 2012 et me suis rendu à Beyrouth, où je suis resté un peu plus d’un an. J’ai ensuite reçu l’ordre, par une décision de la Sûreté générale libanaise, de quitter le pays dans un délai de deux mois. J’ai donc recouru au même moyen que Mahmoud pour obtenir un visa d’entrée en France, et me suis retrouvé à la Maison des journalistes.

À la Maison des journalistes, ou leur « refuge » comme certains l’appellent, les journalistes en exil se voient offrir un hébergement pour six mois, ainsi qu’une partie de leurs besoins quotidiens en nourriture et en transports, et ils sont aidés dans l’accomplissement des démarches relatives à leur séjour en France. En outre, l’association a récemment lancé un site baptisé « L’œil de l’exilé », qui permet à ces journalistes de publier leurs articles.

À ce jour, l’association a accueilli près de 270 journalistes venus d’une soixantaine de pays d’Afrique, d’Amérique latine, d’Europe de l’Est et d’Asie, ainsi que de pays arabes comme le Yémen, le Soudan, la Syrie, l’Iraq ou encore la Palestine. Parmi les journalistes qui y ont séjourné au cours des deux dernières années seulement, 19 sont syriens.

Nombreuses et passionnantes sont les histoires des résidents, mais toutes sont teintées d’amertume. Certains se souviennent des souffrances endurées lors des détentions, tandis que d’autres ponctuent leurs récits de longs soupirs qui trahissent leur colère contenue.

nart

Le journaliste et écrivain Nart Abdulkareem a quitté la Syrie en raison de sa large implication dans l’activisme politique. Il a notamment signé la Déclaration de Damas en 2005.

Le journaliste et écrivain syrien Nart Abdulkareem, 41 ans, a quitté Salmiya, dans la province de Hama, pour s’établir à Damas en 2003. Entré dans l’opposition politique au régime du président Bachar el-Assad par le biais des cercles politiques et littéraires, il signe la Déclaration de Damas en 2005.

Lorsqu’un vent de renouveau souffle sur les pays arabes, Nart y voit l’occasion de contribuer à réaliser le rêve qu’il nourrissait depuis bien longtemps : apporter le changement en Syrie. Il s’engage très tôt dans le mouvement pacifique à Damas, avant d’être arrêté par les forces de l’ordre, le 16 mars 2011, pour avoir participé à un sit-in devant le Ministère de l’intérieur à Damas.

Durant son emprisonnement, Nart rencontre des militants politiques et des droits de l’homme, avec qui il convient de s’associer dans la phase suivante. Après sa libération, il travaille en tant que reporter pour une chaine arabe, raison pour laquelle il est à nouveau poursuivi, recherché par plusieurs services de sécurité. En conséquence, bon nombre de ses amis et confrères militants politiques sont arrêtés, et les forces de l’ordre font des descentes dans ses divers lieux de résidence, qu’il a multipliés pour échapper à l’arrestation.

Le 15 novembre 2011, Nart quitte le territoire syrien clandestinement et se rend en Jordanie, d’où il poursuit son activisme politique en gardant des contacts avec les militants restés en Syrie. Il s’installe à la Maison des journalistes à Paris fin 2012.

J’ai tissé des liens étroits avec Nart, et nous avons beaucoup discuté ensemble du sort de la Syrie et de son expérience personnelle durant la révolution.

Au sujet des difficultés qu’il rencontre en France en tant que journaliste et écrivain et de la poursuite de son travail depuis Paris, Nart indique: « Le plus gros problème, c’est la langue, mais je continue à écrire pour des médias arabes et à me consacrer à mon livre documentaire sur la révolution syrienne, dans lequel je traite de la période allant du décès de Mohamed Bouazizi (le tunisien révolté qui s’est immolé par le feu le 17 décembre 2010 avant de mourir le 4 janvier 2011) jusqu’au 15 mars 2011, date du début de la révolution syrienne. »

Pour Nart, qui réside en France depuis près d’un an et demi, il est encore trop tôt pour déterminer si sa situation lui permet de développer son travail. Quant à un éventuel retour à Damas, il indique : « Je ne pense pas rentrer pour l’instant, bien que ma présence en France m’empêche de couvrir convenablement les évènements sur le terrain. »

 

iyad

L’écrivain engagé Iyad el-Abdallah aspire à retourner en Syrie dès que possible.

L’écrivain syrien Iyad el-Abdallah, 37 ans, a également dû quitter la Syrie à cause de la répression politique. Pour lui et bien d’autres intellectuels de l’opposition, les problèmes ont commencé avant le début de la révolution : « Les difficultés que j’endure, à l’instar des autres écrivains et militants, démontrent que le régime n’accepte pas la culture et les intellectuels, en particulier ceux qui ne suivent pas la ligne officielle. »

J’ai rencontré Iyad à Paris également, et résider dans le même bâtiment que lui pendant près d’un mois m’a permis de bien le connaître. C’est quelqu’un de très joyeux, bien qu’il soit très affecté par les persécutions et l’oppression que lui ont infligées les forces de l’ordre syriennes, et qui l’empêchent de raconter en détails ce qu’il a subi en Syrie.

Parmi ses nombreux ouvrages, il aborde dans « L’Amérique et les Frères musulmans », publié récemment et cosigné avec l’écrivain Hammoud Hammoud, l’avenir des islamistes après la chute de leur règne en Égypte. Il termine actuellement d’écrire un livre sur la position des groupes islamiques impliqués dans le conflit syrien, et mène plusieurs recherches sur divers sujets liés à la révolution syrienne.

« J’ai quitté la Syrie contraint et forcé, et je voudrais y retourner à la première occasion qui s’offre à moi », affirme Iyad, ajoutant au sujet de sa situation actuelle et de ses activités en France : « Je suis confronté à de nombreuses difficultés ici, tout comme la plupart des Syriens arrivés récemment en France. Les plus gros désagréments sont liés au logement; personnellement, j’ai beaucoup souffert sur ce plan. La langue, également, constitue un obstacle de taille. »

Il évoque les difficultés qu’il a eues en se lançant dans les procédures de demande d’asile : « Il ne s’agit pas seulement d’arriver à communiquer avec les gens, mais aussi d’accomplir les formalités nécessaires pour assurer sa situation dans tous les domaines. Or en France, il y a beaucoup de complexités à ce niveau; il faut donc compter au moins une année entière avant de se défaire un tant soit peu des démarches auprès des autorités. »

En ce qui concerne son séjour à la Maison des journalistes, Iyad observe : « Vivre à la Maison des journalistes m’a considérablement libéré de certaines de ces charges. C’est une expérience novatrice. »

 

 

 

Johnny Bissakonou, journaliste centrafricain accueilli par la MDJ, est l’un des « 100 héros de l’information » de Reporters sans frontières à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse 2014.

http://heroes.rsf.org/fr/johnny-bissakonou/

« With the eyes of refugees / Avec les yeux des réfugiés / Con gli occhi dei rifugiati » par Marta Fallani (Eurcom.org, 22 avril 2014)


La Maison des journalistes héberge et accompagne pour une durée de six mois les professionnels de l’information contraints de fuir leur pays.

 (article publié sur A Paris n.49, Hiver 2013-14)

© Émilie Chaix / Mairie de Paris

© Émilie Chaix / Mairie de Paris

Un après-midi, en pleine semaine, rue Cauchy (15e). Le soleil perce à travers les fenêtres de l’ancienne usine de brosses à reluire située au numéro 35. À l’entrée, une coupure de presse encadrée informe le visiteur : « La Maison des journalistes est née. » C’était en 2002. Cela fait onze ans que cet établissement associatif soutenu par la Ville de Paris accueille les journalistes étrangers contraints de fuir leur pays. Présidé par Fabrice Drouelle, il a été créé à l’initiative de Danièle Ohayon, journaliste, et de Philippe Spinau, réalisateur indépendant. « Notre rôle est de venir en aide à ces personnes qui arrivent en France dans l’anonymat et l’indifférence », souligne la directrice, Darline Cothière. La Maison des journalistes (MDJ) dispose de 14 chambres. Les journalistes sont hébergés pour six mois et bénéficient d’une aide matérielle et juridique. Ils viennent pour la plupart de Syrie, du Yémen , d’Irak, d’Iran, du Tchad, d’Afghanistan… À ce jour, plus de 260 professionnels de l’information issus de près de 60 pays différents y ont été accueillis.

Échapper à la prison

Parmi eux, Makaila Nguebla. Ce Tchadien de 42 ans est arrivé en juillet dernier, après de longs mois d’exil en raison de la publication d’articles critiques sur la politique du gouvernement. « Je ne peux plus retourner dans mon pays, où je risque l’emprisonnement », témoigne- t-il. Makaila continue ainsi d’alimenter son blog*, dont le slogan rappelle la raison d’être de la MDJ : « Une plume combattante et indépendante. »

http://makaila.over-blog.com

→ 35, rue Cauchy (15e). Tél. 01 40 60 04 02/05. www.maisondesjournalistes.org

àParis+ sur Paris.fr/aparis : Rencontre avec Makaila Nguebla

 La Cour Pénale Internationale (CPI), juridiction internationale à compétence universelle, fait l’objet de vives critiques. La plupart des dirigeants africains accusent l’institution judiciaire d’être sélective dans sa démarche. Selon eux, elle n’aurait ciblé que des Chefs d’Etats et des leaders du continent noir.

cour-pénale-internationale

 

Les poursuites judiciaires en série par la Cour Pénale Internationale  des dirigeants africains, ont provoqué  la colère de ces derniers qui ont exprimé le sentiment d’être visés et accusent la dite institution de faire une sélection dans sa quête de justice.

 

L’Afrique est-elle visée ?
L’Union Africaine, institution panafricaine, a été saisie par plusieurs pays dont l’Afrique du Sud d’où est issue Mme Nkosazana Dlamini-Zuma, ancienne ministre de l’intérieur dans son pays.

Elle est aujourd’hui à la tête de la Commission de l’U.A. L’Afrique du Sud est devenue pour des Chefs d’Etats africains un lieu qui encourage l’impunité institutionnelle. Ils sont nombreux à posséder des investissements mobiliers et immobiliers et à thésauriser dans les banques sud-africaines les détournements financiers de leurs pays d’origine au profit de leurs intérêts personnels. L’’article 16 du statut de Rome qui a créé la CPI est désormais utilisé comme prétexte pour des pays du continent. Oui, certains ont saisi le Conseil de sécurité en vue d’imposer à cette dite CPI la suspension de toute enquête ou poursuite pour une durée d’un an, renouvelable de facto indéfiniment chaque année. Ainsi, à l’issue d’une réunion tenue le 11 octobre 2013, des ministres des Affaires étrangères de l’Union africaine avaient demandé à l’ONU la suspension des procédures de la CPI contre les dirigeants en exercice.

 

La Société civile africaine n’adhère pas à la démarche de l’Union africaine

 La démarche de l’Union Africaine introduite auprès du Conseil de Sécurité de l’ONU, pour exiger la suspension des poursuites à l’encontre des dirigeants africains, pose problème aux organisations de la société civile sur le continent. Pour celles-ci, l’Union africaine cherche à travers un argument fallacieux à protéger les dictateurs qui essaiment l’Afrique et répriment leurs populations. Par un communiqué de presse, la Ligue Sénégalaise des Droits de l’Homme (LSDH), Human Rights Human et la Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO) ont pour leur part demandé à l’ONU de ne pas céder à la volonté des Chefs d’Etats.

 

Société civile et populations la main dans la main contre l’Union africaine

 L’Union africaine ne peut décider à la place des africains eux-mêmes, souvent victimes de leurs dirigeants devenus des bourreaux. Les populations africaines ne sont pas solidaires de leur institution continentale. Elles les considèrent comme une union entre les Chefs d’Etats, constitués en syndicat. Dans un document rendu public, le 18 novembre 2013, à Johanesbourg (Afrique du sud), plusieurs organisations africaines et internationales ont soutenu que : « les gouvernements africains doivent rejeter l’idée selon laquelle, ils doivent bénéficier d’une immunité spéciale vis-à-vis de la Cour Pénale Internationale (CPI). »

Cette déclaration unanime des ONG africaines, confirme l’inquiétude de nombreux citoyens – ennes sur le continent. Ils pensent que les dirigeants africains réclament ce retrait pour se protéger et se soustraire des poursuites internationales qui seront enclenchées contre eux, une fois déchus du pouvoir. L’Afrique reste-t-elle alors le nid des violences politiques, des répressions généralisées, des violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales ? Demeure-t-elle synonyme de mal gouvernance politique et économique ainsi que de gabegie des ressources des pays des responsables politiques et administratifs ?

Les efforts de la CPI pour traduire en justice les dirigeants des grandes puissances occidentales, supposés capables, s’avèrent minimes, au regard de notre liste. Toutefois, si on prend le cas de la France,  d’anciens présidents, à savoir Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, ont été entendus par la justice de leur pays d’origine sur leur responsabilité de gestion gouvernementale, lorsqu’ils étaient en exercice. La situation de sous-développement dont est plongée l’Afrique, depuis des décennies, trouve ses origines dans l’impunité et l’injustice sociale. Pour que l’Afrique devienne un continent émergent, il lui faut sans complaisance une justice pour tous qui n’épargne personne.

Makaila Nguebla –  http://makaila.over-blog.com/