La MDJ et le CASF, engagés dans l’éducation aux médias à Bischwiller depuis 3 ans

Depuis l’année scolaire 2020/2021, la MDJ avec le CASF, Centre d’Animation Sociale et Familiale Bisch’Art, offre un espace de rencontres inédit entre un journaliste exilé et les jeunes bischwillerois. 

« Il ne faut jamais considérer la liberté de la presse comme acquise »

Manar Rachwani
  • Manar Rachwani avec les jeunes bischwillerois lors de la dernière rencontre.

Un journaliste syrien à la rencontre des lycéens

Cette année, grâce au soutien de la Caf – Allocations familiales, Manar Rachwani, résident de la MDJ, a pu échanger avec deux classes du lycée professionnel Philippe Charles Goulden à Bischwiller sur la liberté d’expression et le droit d’informer. Ils avaient rendez-vous du 14 au 22 novembre pour parler de l’importance d’une information libre et du respect des valeurs citoyennes en démocratie. Les médias sont en effet au programme de français des Secondes, avec leurs professeures Véronique Savry-Billy et Isabelle Gouriet. Documentaliste et professeurs d’anglais sont venus en renfort pour assurer la traduction.

Manar Rachwani est chercheur et journaliste syrien. Il a fui son pays à l’âge de huit ans avec ses parents après le massacre de Hama, qui a fait des milliers de morts en 1982. Il a passé la majeure partie de sa vie en Jordanie, où il a entre autres été chroniqueur au quotidien Al Ghad (« Demain » en arabe) ainsi que « Al-Arab » à Qatar,  puis rédacteur en chef du site Syria Direct en 2019.

Mais il est à nouveau forcé de s’exiler. « La Jordanie voulait normaliser ses relations avec la Syrie, et surveillait les critiques contre mon pays d’origine. Mon équipe, internationale, a été accusée d’espionnage. Aux Syriens, on a proposé soit d’être arrêtés soit de retourner en Syrie. J’ai obtenu un visa humanitaire pour la France. »

Mobilisation contre les « fake news »

Après avoir raconté son histoire, Manar Rachwani a exposé la situation générale au Moyen-Orient et aux contraintes auxquelles les journalistes se heurtent. « En Jordanie, les lignes rouges, ou sujets tabous, sont le roi et la famille royale, l’armée et la police secrète, le pouvoir judiciaire, la valeur de la monnaie nationale, les États du Golfe, et n’importe quel sujet peut le devenir à tout moment. ». Puis il a évoqué l’organisation d’une rédaction.

Pour la dernière séance, mardi 22 novembre, Manar Rachwani s’est exprimé sur les conséquences de la désinformation. « C’est quoi une fake news pour vous ? … », a introduit le journaliste, « …Comment la repérer, la vérifier, la comprendre ?». Ainsi il explique « Dans le flot d’informations, il faut distinguer ce qui relève du journalisme, de la propagande, de la publicité, du divertissement. En anglais, plusieurs vocables affinent le terme générique « fake news », ce qui les différencie, c’est l’intention. »

Ce témoignage direct fut un moment fort pour les lycéens qui ont pu prendre conscience des dangers encourus par les journalistes dans le monde, des enjeux liés au journalisme et à la liberté d’informer dans le monde. Cette rencontre leur a également permis de réfléchir aux conditions de vie des personnes en exil.

Manar Rachwani s’est retrouvé à Bischwiller, à la demande du centre d’animation sociale et familiale (CASF).  « On a repéré des jeunes qui tenaient un discours radical, tant politique vers l’extrême droite que religieux vers l’islam. Il fallait qu’on trouve les bons interlocuteurs pour discuter avec eux. » s’exprime le directeur du centre, Damien Lenouvel, « Les jeunes attirés par un discours idéologique s’informent souvent peu, ou sur les réseaux sociaux. Ils ne différencient pas les opinions des faits, se laissent enfermer plutôt que de s’ouvrir au débat et aux points de vue ».