LA 34E SEMAINE DE LA PRESSE ET DES MÉDIAS À L’ÉCOLE

La 34e édition de la Semaine de la presse et des médias dans l’École ® s’est tenue du 27 mars au 1er avril 2023. Pendant ces cinq jours, collégiens et lycéens ont échangé autour de la thématique “L’Info sur tous les fronts”. A cette occasion, pour la seizième année consécutive, la Maison des journalistes a mobilisé ses résidents, anciens et actuels, afin de sensibiliser les jeunes aux enjeux de la liberté d’expression et du métier de professionnel des médias dans le cadre du programme “Renvoyé spécial”. Malgré les grèves, de nombreuses rencontres dans toute la France ont pu avoir lieu cette année encore.

Simon Suleymani, journaliste kurde (Turquie) au lycée Joliot-Curie à Hirson

Simon Suleymani, journaliste kurde (Turquie) au lycée Joliot-Curie à Hirson

Mardi 28 mars : Première escale au Nord et en Normandie

Trois rencontres ont eu lieu le deuxième jour de cette semaine mouvementée. Simon Suleymani, journaliste kurde et ancien résident de la MDJ, s’est rendu à Hirson dans les Hauts-de-France pour échanger avec des élèves du Lycée des métiers Joliot-Curie. Là-bas il a réalisé deux rencontres. A l’issue de ses interventions, les lycéens l’ont salué pour son courage et l’ont remercié d’avoir partagé son histoire.

Au même moment, le journaliste syrien Sakher Edris répondait par téléphone aux questions des élèves du Lycée Léopold Sédar Senghor d’Evreux (Eure, Normandie) sur leur radio. L’ancien résident de la MDJ et habitué du programme Renvoyé spécial a évoqué le destin tragique de la Syrie au prisme de son histoire personnelle : dans le contexte des manifestations du Printemps arabe, l’emprisonnement de son père et de son oncle…

Mercredi 29 mars : Vidéo en différé : la mission de sensibilisation de la Maison des Journalistes par-delà les océans

Le programme Renvoyé Spécial s’invite aussi dans les régions d’outre-mer grâce à la vidéo en différé. La journaliste Gathy Kafuti Mpolo, originaire de la  République démocratique du Congo, a ainsi pu répondre face caméra aux questions des élèves du Lycée de Vincendo de Saint-Joseph (La Réunion). Elle leur a raconté son parcours de journaliste et sa volonté d’informer le peuple malgré les intimidations, puis son arrestation pour avoir fourni des informations à une chaîne privée qui ne soutenait pas le pouvoir, son départ de la RDC, son exil et son arrivée en France difficile. Gathy connaissait déjà l’insécurité dans son pays, mais elle a dû “vivre à la belle étoile” quelques jours avant d’entendre parler de la Maison des Journalistes. Arrivée le 18 juillet 2018 dans les locaux de la MDJ, elle a enfin pu [se dire] “je suis en sécurité”. L’association l’a ensuite accompagnée dans ses démarches pour obtenir le statut de réfugiée, depuis la demande à l’OFPRA jusqu’à la décision de la CNDA lui garantissant le droit d’asile le 17 juillet 2019. Mais aujourd’hui encore, elle se heurte à la complexité des démarches administratives en tant qu’immigrée, notamment celles permettant la réunification familiale – elle qui a dû partir sans ses enfants. Afin de subvenir à ses besoins, Gathy a changé de voie professionnelle et s’est orientée vers la sécurité. Dans ce contexte, elle explique : “[le programme Renvoyé Spécial] me rappelle mon boulot en tant que journaliste, ça me réconforte”. Une belle manière d’achever son intervention passionnante.

Gathy Kafuti Mpolo, journaliste congolaise, entrain d’exposer la situation de la liberté de la presse au Congo, aux élèves de Saint-Joseph à La Réunion.

Jeudi 30 mars : trois représentants de la MDJ aux Assises internationales du journalisme de Tours

Invité aux Assises internationales du journalisme de Tours du 27 au 30 mars, Alhussein Sano, résident de la MDJ guinéen, était accompagné par Albéric de Gouville, président de l’association. Il a raconté son parcours et discuté de la liberté de la presse devant un public composé principalement de lycéens tourangeaux. En parlant de Renvoyé spécial, il conclut : « Ça me fait du bien ces rencontres. Cela me permet de parler de mon métier. J’échange avec des collégiens et des lycéens, je leur parle de l’importance de la liberté d’expression qui est un pilier de la démocratie et même, pour moi, un pilier de l’existence. »

Alhussein Sano et Albéric De Gouville discutent de la liberté de la presse sur la scène de l’Agora à Mame, aux Assises internationales

Vendredi 31 mars : Une journée riche en rencontres pour clôre la Semaine de la presse et des médias dans l’École ®

Le vendredi 31 mars, dernier jour de la Semaine de la presse et des médias dans l’École ®, a été une journée riche en rencontres. Gathy Kafuti Mpolo a assuré une seconde intervention au Lycée Hilaire de Chardonnet à Châlon-sur-Saône (Bourgogne-Franche-Comté).

Le même jour,  Sakher Edris s’est rendu au Lycée Gérard de Nerval à Soissons, dans les Hauts-de-France, pour échanger avec des terminales STMG. La rencontre, préparée par les professeures, a pu se tenir entièrement en anglais. Le journaliste syrien a d’abord présenté l’histoire de son pays, puis a comparé les situations en France et en Syrie pour aborder les notions de liberté de la presse, de liberté d’expression et son statut de réfugié et de journaliste en exil.

La Semaine de la presse s’est terminée avec la présentation du photojournaliste syrien Mohammed Badra au Lycée Brassaï à Paris (Ile-de-France). En présence des partenaires de la Maison des Journalistes – le Clemi et la région Ile-de-France, le journaliste a échangé avec des lycéens en spécialité photographie. Il leur a présenté son métier :  « Descartes dit « je pense, donc je suis », mais pour moi, en tant que photojournaliste, ce serait plutôt  »je vois donc je suis » ». Sa présentation était axée sur l’art du storytelling. Il a expliqué comment celui-ci sert le journalisme : “Le storytelling c’est l’art de raconter des histoires, de ne pas laisser l’information comme fait isolé mais de la faire résonner avec son contexte. ». C’est aussi une manière “de garantir les droits des victimes, de les rendre d’anonymes à éternelles”.  « En réalité, les choses se produisent lorsqu’on les raconte”, poursuit-il, “Le métier des storytellers consiste à recréer les événements pour celui qui écoute, qui regarde ou qui lit. » En venant raconter sa propre histoire, il a su impliquer son auditoire dans l’histoire récente de la Syrie.

Ces rencontres ont sans nul doute été marquantes pour les lycéens qui ont eu la chance de rencontrer ces journalistes au parcours hors du commun. Elles permettent de développer leur esprit critique en les sensibilisant aux enjeux de l’information, d’encourager leur engagement citoyen en faveur de la démocratie et de les confronter à d’autres points de vue sur les parcours d’exil.

Par Nolwenn Moulin-Roussel