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Mercredi 31 janvier 2018, Rémy NGONO, journaliste et écrivain camerounais est parti à la rencontre des élèves du lycée Joliot-Curie de Dammarie-Les-Lys dans l’académie de Créteil, accompagné de Clara LE QUELLEC, bénévole à la MDJ. L’occasion pour ces lycéens de seconde bac pro, accompagnés de leur professeur de lettres/histoire-géo madame Léa AMBERT, d’échanger sur les valeurs fondamentales de la liberté d’expression, de la liberté de la presse mais également sur la douleur de l’exil.

Le journaliste camerounais Rémy NGONO intervient au lycée de Dammaries-les-Lys dans le cadre de Renvoyé Spécial Île-de-France qui met en avant les journalistes écrivains en exil. Photo © Clara LE QUELLEC

« Vous savez, on ne choisit jamais son exil ». Pendant deux heures, Rémy NGONO, ancien résident de la Maison des journalistes, a livré un témoignage poignant sur son parcours professionnel au Cameroun, la violence et les difficultés rencontrées face à l’oppression du pouvoir, l’épreuve de l’exil et sa nouvelle vie en France.

Véritable combattant pour la liberté d’expression, celui qui a été un temps journaliste pour la chaîne d’état camerounaise CRTV puis directeur et animateur de la Radio Télévision Siantou, a été menacé, interdit d’exercer sa profession puis forcé de quitter son pays en 2005. Son crime ? Avoir dénoncé dans son émission satirique « Coup franc » la mainmise du président Paul BIVA sur la société.

Jouissant d’une reconnaissance dans son pays pour avoir gagné le prix Cameroon Presse Awards et le prix du Comité de l’Excellence Africaine, il se fait remarquer, quelques temps plus tard après son arrivée en France, par la radio RFI qui lui propose alors de devenir consultant sportif. Une formidable opportunité de reconstruction mais aussi un challenge pour celui qui avait fait de la politique son cheval de bataille. « J’ai beaucoup lu et tout appris sur le sport, je n’y connaissais rien ». Parce qu’il aime manier le verbe et reste très attaché à son continent et à sa patrie camerounaise, il publie son premier livre « Comme le dit un proverbe africain » en 2010.

Aujourd’hui, Rémy Ngono fait partie d’une minorité de journalistes exilés pouvant continuer à vivre de leur passion et de leur métier. Travaillant sur l’écriture d’un nouveau livre, il reste un fervent défenseur de la liberté d’expression et de la liberté de la presse, deux valeurs fondamentales qu’il souhaite transmettre aux jeunes présents dans la salle. « Je suis venu en France pour les idées » répète t-il.

Le journaliste et écrivain a ensuite laissé la parole aux élèves pour un long temps d’échange et de nombreuses questions.

Quelques retours d’élèves émus par ce témoignage, concernés par la liberté de la presse et exprimant leur soutien aux journalistes exilés :

« J’ai été frappé par le courage de ce journaliste. Je le remercie de nous avoir accordé un peu de son temps. »

« J’ai beaucoup aimé son témoignage car il a tout dit sans retenue notamment sur la corruption en Afrique. »

« Je ne pensais pas que tant d’horreur était commise au Cameroun et je ne comprends pas qu’en France personne n’en parle. »

« La liberté de la presse dans une société est très importante car sans elle, un pays est comme emprisonné et donc on ne peut pas être en sécurité. »

« Je trouve qu’il y a vraiment un manque de considération de la part des gens envers les journalistes exilés. »

« Il faut que les pays qui les accueillent fassent plus attention à eux. »

« J’aimerais souhaiter bonne chance aux journalistes exilés, gardez la tête haute et le cœur rempli de courage ! »

« N’abandonnez pas votre combat, un jour cela changera ! »

« Merci Monsieur Ngono, je partagerai vos paroles là où je pourrais pour qu’elles touchent un grand nombre de personnes. »

 

Les 25 et 26 janvier, la MDJ a ouvert ses portes pour deux journées de reportage à une classe de 4ème du Collège Jean-Baptiste Clément à Dugny et une classe de 4ème du collège Marie Curie des Lilas (académie de Créteil). Accompagnés de plusieurs de leurs professeurs, de Laura RONCA, chef du projet pour l’association Citoyenneté et Jeunesse et de Valérie ROHART, journaliste et organisatrice de ce projet, les élèves ont dans un premier temps visité les locaux de la MDJ, guidés par Margot FELLMANN, volontaire en Service Civique. Ils ont ensuite interviewé des journalistes hébergés par l’association, Mortaza BEBHOUDI d’Afghanistan (ancien résident), Thelma CHIKWANHA du Zimbabwe et un journaliste turc. D’autres élèves ont quant à eux rencontré Darline COTHIERE, directrice de la MDJ ainsi que Catherine MONNET, rédactrice en chef, et Paul COPPIN, responsable juridique de Reporters sans frontières.

Cette visite s’inscrit dans la réalisation d’un projet radio au sein des établissements qui participe à l’éducation aux médias de ces jeunes. Les élèves avaient préparé en avance ces interviews et ont ainsi mené les discussions de manière autonome. Pour Valérie ROHART : « Grâce à la richesse des interventions et témoignages, la Liberté d’Expression est devenue pour eux, autre chose qu’un concept flou, et/ou un privilège de journalistes et de dessinateurs. Ils ont compris, je pense, qu’il s’agit d’un bien commun fragile qu’il faut défendre. »

Les deux classes ont ensuite pris la direction du Palais de Justice de Paris, où elles ont assisté au procès contre Mediapart, L’Obs et Le Point, et deux ONG, Sherpa et ReAct, attaqués en diffamation par la holding luxembourgeoise Socfin, fortement liée au groupe Bolloré.

Le jeudi 25 janvier, le journaliste guinéen (Rep. de Guinée), Mandian Sidibe, a été accueilli au lycée Marcelin Berthelot de Pantin dans l’académie de Créteil. Dans le cadre de l’opération Renvoyé Spécial, il est intervenu auprès d’une trentaine d’élèves de seconde ainsi que plusieurs élèves allophones de l’établissement. Il a pu partager son parcours de journalistes et les raisons de son exils. Cet échange a également été l’occasion de sensibiliser les jeunes à la situation méconnue mais difficile de la République de Guinée. Monsieur SIDIBE s’est exprimé sur « la catastrophique gouvernance de Monsieur Alpha Condé, avec en toile de fond la violation récurrente des Droit de l’Homme, les persécutions subies par les journalistes, le bradage des mines, la tentative de modification de la Constitution […] », etc.

Le journaliste Mandian SIDIBE au lycée Berthelot de Pantin le 25 janvier 2018 Photo © Mandian Sidibe

Mandian SIDIBE, présentateur radio en Guinée, a ensuite été l’invité de la rédaction politique de la radio du lycée. Cette année, les lycéens réalisent en effet une série d’émissions radio sur le thème des migrations encadrés par leurs professeurs, mesdames Florence BARBIER et Béatrice BEONNEL.

Mandian SIDIBE interviewé par les lycées dans le cadre de leur projet radio sur le thème des Migrations. Photo © Mandian Sidibe

Les élèves ont eu l’occasion de réagir à cette rencontre. Voici quelques extraits :

« Je sais désormais beaucoup plus de choses sur ce qu’il se passe en Afrique et cela me permet de mieux comprendre mon pays, le Congo. »

 » Je trouve qu’il y a trop peu de moyens mis en oeuvre pour donner de la visibilité aux journalistes en exil. »

« D’après moi, le rôle du journaliste c’est de rétablir la vérité sur la société où nous vivons. Il doit s’informer et informer les autres et leur donner la parole pour changer le monde. »

« La liberté de la presse est très importante car il y a des faits qui ne sont pas révélés alors qu’ils le devraient. »

« Les journalistes doivent dire et dénoncer ce qu’ils pensent de la société, la liberté de la presse est utile pour cela. »

 

Le mardi 23 janvier, un journaliste turc, accueilli par la Maison des journalistes, s’est rendu à Poitiers dans le cadre de l’opération Renvoyé Spécial. Il est intervenu devant une classe de trente élèves de première du lycée Saint-Jacques de Compostelle (académie de Poitiers). Il a témoigné de son parcours de journaliste réfugié, des raisons qui l’ont poussé à fuir son pays, la Turquie, et des obstacles qu’il doit encore franchir ici en France. Après un moment de présentation de son histoire, le journaliste a pu échanger librement avec les jeunes.

Cette rencontre a été l’occasion de plus particulièrement aborder la situation de la Turquie, la plus grande prison du monde pour les journalistes.

Quelques réactions des lycéens recueillies après l’échange :

« Nous n’avons pas tous une « belle vie », certains ne choisissent pas leur avenir. »

« Cette rencontre nous a permis de savoir ce qu’il se passe réellement en Turquie. »

« Je ne savais pas que les journalistes pouvaient être torturé en prison. »

« La vitesse à laquelle les choses se sont passées, les violences, la fermeture du journal m’ont marqué. »

« Vous avez fait preuve d’un grand courage. C’est une période sombre d’une vie, vous subissez une injustice dont vous n’êtes pas coupable. Gardez votre force, votre courage et l’amour de la vie. »

« La souffrance qu’a dû endurer le journaliste est marquante. Il est éloigné de tous les gens qu’il aime. »

« Je suis frappé par le fait qu’il y ait eu un coup d’état et que de nombreux journalistes ont été mis en prison. »

« J’espère que vous pourrez revenir dans votre pays voir votre famille. »

« Il est important de pouvoir donner son avis à tout moment et de le faire partager au reste du monde. »

« C’est honteux de voir des personnes libres de toute expression se voir supprimer leur droit de travailler et de retrouver du travail. »

 

Revue de presse :

Centre Presse, Face aux lycéens un journaliste turc en exil, par Frédéric Delâge, publié le 24.01.2018

La nouvelle republique, Poitiers : le témoignage d’un journaliste turc en exil, publié le 26 janvier 2018

Le jeudi 18 janvier, le journaliste syrien exilé Raafat AL-GHANEM a été accueilli au lycée Aristide Briand d’Evreux dans l’académie de Rouen. Dans la cadre de l’opération Renvoyé Spécial, des lycées de seconde et de terminale ES, L et STMG, accompagnés de leurs professeurs  Lucille ANGIBOUST et Katia BOUCHEZ, ont pu échanger avec le journaliste sur la situation de la Syrie, la liberté de la presse dans ce pays et dans le monde, ainsi que sur son parcours en tant que professionnel de l’information en exil.

Le journaliste syrien Raafat AL GHANEM à la rencontre des lycéens d’Evreux le 18 janvier 2018 Photo © paris-normandie.fr

Revue de presse : 

Paris-Normandie.fr, Un journaliste syrien en exil devant des lycéens d’Évreux publié le 19.01.2018

D’autres publications sont à venir.

 

Les réactions des élèves :

Est ce que ce témoignage vous a été utile ?

« Oui, instructif et poignant. »

Qu’est ce qui vous a frappé dans ce témoignage ?

« Ce qui m’a frappé, c’est la banalisation des tortures et des viols dans le discours de l’intervenant qui a vécu dans un pays en guerre. »

Quelle est votre avis sur la situation des journalistes en exil?

« C’est une excellente chose que des journalistes puissent s’exprimer sans soucis de censure ou pire ( prison, mort) et bénéficient d’une protection et des droits fondamentaux de l’être humain. »

Qu’est ce que vous aimeriez dire aux journalistes exilés?

« On est avec vous. »

La journaliste rwandaise en exil Maria KUANDIKA (pseudonyme) a été accueillie mardi 19 décembre 2017 au lycée Bernard Palissy de Saint-Léonard-de-Noblat (87) dans l’académie de Limoges. Elle a échangé avec une cinquantaine d’élèves de seconde et de première accompagné de leur professeure madame Marie-Aude CHARRET et du provinseur monsieur Olivier GUIMBAUD.

La journaliste rwandaise Maria KUANDIKA au lycée Bernard PALISSY le 19 décembre 2017 Photo © Bernard LEFEVRE | Le populaire du Centre

Maria KUANDIKA a notamment pu sensibiliser les élèves à la situation de la liberté de la presse dans le monde et dans son pays, le Rwanda. A travers l’exemple de ses reportages auprès d’une ethnie oubliée du Rwanda, les lycéens ont appris l’importance du travail journalistique comme un porte-voix des minorités et comme un pouvoir capable de déranger les instituons politiques en place. Pour madame KUANDIKA, « il est important de se battre pour ses idées. Il faut garder l’espoir que les choses s’améliorent ».

 

 

Les élèves ont pu partager leur ressenti à la suite de cette rencontre. Voici quelques-uns des commentaires recueillis :

« Courage ! Ne vous laissez pas faire, prenez les devants et allez vous exprimer dans un pays où vous ne serez pas poursuivis ! Merci pour ce témoignage ! »

« Aujourd’hui, les journalistes sont d’une grande aide pour les gens qui veulent ou ne peuvent pas s’exprimer. Ils peuvent parfois beaucoup changer les choses. »

 » Continuer à dénoncer, car cela ne sert pas à rien. »

« L’écart qu’il y a entre la ville et la campagne au Rwanda est frappant. Les maladies et la malnutrition des enfants et des adultes aussi. »

« C’est incroyable que des personnes voulant faire avancer leur pays ou aider des gens soient obligés de quitter leur pays. »

« C’est un témoignage sincère qui nous montre ce que les journalistes vivent vraiment en exerçant leur métier. »

« J’ai été frappé et ému par la façon dont Maria KUANDIKA parle de ce qui lui est arrivé. Elle n’est pas gênée, j’ai aimé qu’elle partage cela sans tabou, ce qui ne doit pas être facile à faire. »

 

Revue de presse :

Menacée de mort, une journaliste rwandaise est venue témoigner de son exil aux lycéens de Saint-Léonard-de-Noblat, par Driss CHAÏT, Le populaire du Centre, 21/12/2017